Le 6 octobre 2011
Monsieur Jason D. Bennett
Secrétaire général
Association canadienne des courtiers de fonds mutuels
121, rue King Ouest, bureau 1000
Toronto (Ontario) M5H 3T9
Transmis par courriel à : corporatesecretary@mfda.ca
Anne Hamilton
Senior Legal Counsel
Capital Markets Regulation Division
British Columbia Securities Commission
701 West Georgia Street
P.O. Box 10142, Pacific Centre
Vancouver (Colombie-Britannique) V7Y 1L2
Transmis par courriel à : ahamilton@bcsc.bc.ca
OBJET : Demande de commentaires au sujet des Modifications proposées à la Règle 2.2.1 (« Connaissance du client ») et au Principe directeur no 2 sur les normes minimales de surveillance des comptes de l’ACFM
FAIR Canada est heureuse d’offrir des commentaires sur des modifications proposées par l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACFM), qui visent à préciser que les obligations relatives à la convenance des placements de la Règle 2.2.1 s’appliquent également aux stratégies d’effet de levier, ainsi qu’à codifier les normes minimales que les membres et les personnes autorisées doivent respecter lorsqu’ils évaluent la convenance d’un emprunt d’un client, tel que l’énonce le bulletin no 0487-P de l’ACFM publié le 11 juillet 2011 (les « modifications proposées »).
FAIR Canada est un organisme sans but lucratif national de défense des épargnants. À titre de représentant des investisseurs canadiens, FAIR Canada milite pour une plus grande protection des investisseurs dans le domaine de la réglementation des valeurs mobilières. Pour de plus amples renseignements, consultez notre site www.faircanada.
Sommaire des commentaires et des recommandations de FAIR Canada :
1. FAIR Canada appuie les modifications proposées qui préciseront que les obligations relatives à la convenance des placements s’appliquent aux stratégies d’effet de levier et qui prescriront les normes minimales à respecter pour évaluer la convenance de telles stratégies.
2. FAIR Canada pense que certaines personnes autorisées et leurs sociétés poussent les consommateurs à emprunter pour investir (c’est-à-dire à utiliser l’effet de levier) en brossant un tableau trompeur des risques et des avantages d’une telle stratégie. Cette situation découle du décalage qui existe entre les intérêts de l’intermédiaire financier et ceux de l’investisseur. FAIR Canada soutient que le secteur doit présenter clairement, pleinement et explicitement aux investisseurs les risques associés à une stratégie de placement faisant appel à l’effet de levier, dans un langage qu’ils comprennent. Plus précisément, il devrait être interdit de minimiser les risques connexes dans le matériel de marketing.
3. FAIR Canada recommande qu’il soit obligatoire de divulguer pleinement au client les commissions et autres formes de rémunération que vaudra à la personne autorisée/l’intermédiaire le fait que le client ait utilisé l’effet de levier.
4. FAIR Canada juge que les critères de base qui serviraient selon les modifications proposées à déterminer la convenance des stratégies d’endettement ne sont pas assez élevés pour protéger
adéquatement les investisseurs. FAIR Canada recommande qu’il y ait une présomption que l’effet de levier ne convient pas aux investisseurs de détail, de telle sorte qu’il revienne à la personne autorisée qui recommande un emprunt de démontrer que cela convient effectivement au client. FAIR Canada réclame des protections additionnelles ou accrues en ce qui concerne les connaissances en matière de placements, la tolérance du risque, la valeur nette, le revenu brut, le statut d’emploi et la capacité d’absorber des pertes.
5. FAIR Canada recommande que les organismes canadiens de réglementation des valeurs mobilières, dont l’ACFM et l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM), s’engagent réellement à améliorer la protection des investisseurs en adoptant un « modèle Le client avant tout » qui exigerait que toute recommandation faite à un client soit dans son intérêt véritable, plutôt que d’exiger simplement qu’elle lui convienne, le concept de la convenance n’étant pas compris par les consommateurs et pouvant être trompeur.
6. FAIR Canada propose une obligation d’attestation, qui obligerait les personnes autorisées à attester, lorsqu’elles recommandent à un client d’emprunter pour investir, qu’elles ont expliqué au client les risques associés à l’effet de levier et que, d’après leur évaluation, celui-ci comprend les risques encourus. Le client confirmerait que les risques lui ont été expliqués et qu’il les comprend. Nous suggérons un formulaire pour cette attestation à l’Appendice 1 du présent document. Le formulaire proposé est une version modifiée de l’Annexe B de l’Avis de réglementation RM-0074 de l’ACFM (document d’information détaillé sur les risques).
7. FAIR Canada est préoccupée par le fait que les opérations et les recommandations faisant intervenir l’effet de levier ne soient pas assujetties à un examen obligatoire du personnel chargé de la surveillance des succursales et du siège social lorsqu’elles concernent des REER et des REEE. Elle recommande un examen obligatoire de la succursale ou du siège social dans ces cas.
1. FAIR Canada appuie les obligations relatives à l’évaluation de la convenance des emprunts
1.1. FAIR Canada appuie les modifications proposées à la Règle 2.2.1 de l’ACFM qui
obligeraient explicitement les membres et les personnes autorisées à s’assurer :
a) que chaque recommandation d’emprunter pour investir convienne au client auquel
elle est présentée;
b) que le client soit avisé si une opération qu’il propose et qui implique
l’utilisation de fonds empruntés ne lui convient pas; et
c) qu’une évaluation de la convenance d’emprunter pour investir soit faite en
présence de certains éléments déclencheurs.
1.2. Même si l’ACFM note qu’elle a toujours interprété la Règle 2.2.1 comme incluant une obligation d’évaluer la convenance d’un emprunt, nous pensons que le fait d’exiger expressément une telle évaluation, y compris en cas d’événements prescrits, améliorera la protection des investisseurs. L’effet de levier amplifie le risque associé à un portefeuille. Comme le précise le Guide de surveillance de l’effet de levier de l’ACFM, « [u]n prêt à effet de levier ne convient probablement pas à une personne sans emploi ou ayant un revenu faible, à un travailleur autonome (dont le revenu est instable) ou à un retraité ». Il faut, minimalement, évaluer si l’effet de levier convient au client. Pour FAIR Canada, il est important que les Règles de l’ACFM exigent
expressément que les recommandations d’emprunter pour investir et les opérations qui impliquent l’utilisation de fonds empruntés fassent l’objet d’une évaluation de la convenance.
1.3. En 2010, la Commission des valeurs mobilières du Nouveau-Brunswick a publié un
rapport à la suite de son examen de l’utilisation de l’effet de levier dans la province.1 On
y note une corrélation entre les dossiers jugés « dynamiques »2 et ceux qui affichaient
une perte. Une corrélation élevée est aussi constatée entre les placements inadéquats et
les pertes encourues. D’après le rapport, ces deux observations font ressortir le risque que
comportent les comptes avec effet de levier. « Ces statistiques donnent à penser que si le
caractère adéquat du compte d’un client n’est pas examiné convenablement, le client
risque fort de subir les conséquences d’une mauvaise répartition de l’actif ».3 Pour FAIR
Canada, ces observations soulignent l’importance d’évaluer la convenance de l’effet de
levier.
1.4. Les Statuts, les Règles et les Principes directeurs de l’ACFM sont normatifs, tandis que ses Avis (y compris ses Lignes directrices) sont des instruments non contraignants qui visent à fournir des interprétations ou des orientations seulement. En modifiant la Règle 2.2.1 et le Principe directeur no 2, l’ACFM codifiera les normes minimales à respecter pour évaluer la convenance d’un emprunt pour un client, ce qui fera de cette règle et de ce principe directeur des obligations plutôt que des interprétations suggérées. FAIR Canada souscrit pleinement à la codification des normes pour améliorer la protection des investisseurs.
2. Les investisseurs doivent être clairement informés des risques associés à l’effet de levier
2.1. FAIR Canada pense que certaines personnes autorisées et leurs sociétés suggèrent l’effet de levier aux consommateurs et les persuadent d’emprunter pour investir (c’est-à-dire d’utiliser l’effet de levier) en leur brossant un tableau trompeur des risques et des avantages d’une telle stratégie. Les conseillers et les sociétés sont incités à agir ainsi en raison du désalignement qui existe entre les intérêts de l’intermédiaire financier et ceux du consommateur.
2.2. Persuader des clients d’investir en utilisant des fonds empruntés profite aux sociétés et aux conseillers d’un certain nombre de façons. Les emprunts des clients entraînent une augmentation des commissions, des frais et des honoraires pour la société et le conseiller. Ils augmentent aussi les sommes investies qu’ils ont à gérer.
2.3. Les prêts pour placement sont hautement profitables pour les institutions financières qui
les consentent. Les sociétés et les conseillers en profitent lorsqu’ils génèrent de telles
affaires pour des sociétés liées. Cela est particulièrement vrai dans les sociétés ayant une
branche de services bancaires.
2.4. Compte tenu de ce désalignement des intérêts, FAIR Canada croit qu’il faut minimalement que les normes concernant la convenance s’appliquent à toute stratégie ou tout placement faisant intervenir l’effet de levier.
2.5. Certains documents de marketing traitant de l’effet de levier minimisent les risques associés au fait d’emprunter pour investir, d’une manière trompeuse pour les investisseurs. Par exemple, sur le site Web de RBC Planification financière, un article intitulé « Comment maximiser votre temps et votre argent » inclut les renseignements suivants au sujet de l’effet de levier :
Maximiser l’argent pour faire des placements plus rentables
L’effet de levier est un concept fascinant. Il consiste à utiliser un dollar pour contrôler plusieurs dollars. Vous y recourez lorsque vous achetez une maison ou faites financer l’achat d’une voiture. Vous détenez le bien, mais vous n’avez eu à fournir qu’une fraction du prix.
Vous pouvez faire la même chose pour des placements – c’est ce qu’on appelle avoir un compte sur marge. Le compte sur marge permet de faire plus de placements avec l’argent dont vous disposez.
Si vous répondez aux conditions requises pour ouvrir un compte sur marge auprès de votre courtier, vous pouvez emprunter de l’argent sur les titres que vous pouvez donner en garantie; il peut s’agir de CPG, d’actions, de titres du marché monétaire, d’obligations ou encore de parts de fonds communs de placement.
Normalement, vous pouvez emprunter jusqu’à 50 % de leur valeur. Donc, si vous aviez 50 000 $ de titres pouvant être donnés en garantie, vous pourriez emprunter jusqu’à 25 000 $ sur ces titres.
Vous pouvez ensuite placer ces 25 000 $ comme bon vous semble. Si l’augmentation de la valeur de vos placements est supérieure au taux d’intérêt sur votre prêt sur marge, vous tirez votre épingle du jeu.
À l’inverse, si la valeur de vos placements diminue ou si la valeur des titres portés sur votre marge diminue, vous pourriez recevoir un « appel de marge », c’est-à-dire devoir déposer des fonds pour compenser la baisse de valeur.
Faire des placements peut être risqué. Faire des placements avec de l’argent emprunté accroît ce risque. Pour utiliser cette méthode, il ne faut pas avoir de réticence à contracter un crédit pour investir. Pour bon nombre d’investisseurs, les avantages peuvent souvent surpasser les risques.
Toutefois, les comptes sur marge ne conviennent pas à tous les investisseurs. Vous devez toujours tenir compte de votre horizon de placement, de la répartition de l’actif et de votre tolérance au risque. En bref, vous seul savez si un compte sur marge vous convient.4 [Les caractères gras ont été ajoutés par FAIR Canada.]
2.6. Les « avertissements » contenus dans l’extrait ci-dessus n’informent pas les investisseurs
de l’étendue réelle des risques de l’effet de levier, en particulier du fait qu’il amplifie les pertes. Le marketing insiste sur les avantages plutôt que sur les risques. FAIR Canada considère ce document de marketing comme une déclaration trompeuse au sens de l’Avis de réglementation aux membres RM-0070 de l’ACFM, intitulé Communications trompeuses au sujet de l’endettement externe.5 Plus précisément, nous pensons qu’il contient des « déclarations qui promettent un rendement, mais qui n’indiquent pas ou qui indiquent de façon inadéquate le risque de perte ou les rendements négatifs possibles », l’un des exemples de déclarations trompeuses donnés dans l’Avis.
2.7. Présenter les pertes potentielles comme de simples appels éventuels de marge fait abstraction des risques qu’il y a d’emprunter pour investir. Assimiler une stratégie de placement avec effet de levier à un emprunt pour financer l’achat d’une voiture ou d’une maison donne une représentation complètement erronée des risques inhérents au fait d’emprunter pour investir et constitue une analogie irresponsable dans ce contexte.
2.8. Il ne s’agit là que d’un exemple de marketing de l’effet de levier fait par une grande société de placement canadienne. Nous pensons que les risques de l’effet de levier sont mal communiqués à beaucoup d’investisseurs canadiens. Les risques que comporte une stratégie de placement recourant à l’emprunt sont trop grands pour que l’on n’oblige pas les sociétés et les conseillers à les présenter clairement, pleinement et explicitement aux investisseurs dans un langage que ceux-ci comprennent, que ce soit dans des documents de marketing, dans des discussions sur des placements ou de toute autre manière.
2.9. FAIR Canada considère particulièrement abusifs des cas où des conseillers incitent des personnes du troisième âge à utiliser des stratégies d’effet de levier.
2.10. FAIR Canada s’inquiète particulièrement du fait qu’on suggère à des investisseurs d’emprunter sur la valeur nette de leur maison et qu’on les encourage à le faire. Il serait selon nous malavisé pour la vaste majorité des gens d’emprunter sur la valeur nette de leur maison pour faire des placements, en particulier parce que cela pourrait les exposer à perdre leur maison à un moment où ils auraient déjà subi d’importantes pertes de placement. Les rares investisseurs pour qui une telle stratégie serait appropriée devraient avoir l’obligation d’obtenir un avis juridique
indépendant avant de l’appliquer.
3. La pleine divulgation des commissions et autres formes de rémunération est essentielle
3.1. Compte tenu du désalignement des intérêts auquel nous avons fait référence dans la section 2 ci-dessus, il est essentiel que les investisseurs soient informés de ce qui peut inciter un intermédiaire financier à leur recommander d’emprunter pour investir.
3.2. FAIR Canada recommande que, chaque fois que l’utilisation de l’effet de levier est recommandée à un client, l’intermédiaire soit tenu de divulguer le montant des commissions additionnelles et autres formes de rémunération que cela lui vaudra (ou à toute entité reliée). Cette obligation devrait s’ajouter à celle de divulguer pleinement les commissions et autres formes de rémunération découlant des produits de placement recommandés.
4. L’effet de levier devrait être présumé non convenable; les critères proposés pour déterminer la convenance de l’effet de levier ne sont pas assez élevés
4.1. FAIR Canada recommande qu’il y ait une présomption que l’effet de levier ne convient
pas aux investisseurs de détail et, donc, qu’il revienne à la personne autorisée qui recommande l’utilisation de l’effet de levier de démontrer que cela convient au client et que celui-ci en comprend les risques. Nous pensons que le fait d’obliger les personnes autorisées à démontrer que l’effet de levier convient à un investisseur de détail donné augmentera la protection des investisseurs; FAIR Canada estime que le fait de faire reposer le fardeau de la preuve sur les représentants pourrait régler certains des problèmes évoqués dans la section 2 ci-dessus au sujet du désalignement des intérêts. L’effet de levier devrait être considéré « mauvais » pour les investisseurs de détail en général, les exceptions étant les cas où il est clair que l’investisseur tolère suffisamment le risque pour assumer un emprunt donné. Les représentants inscrits pourraient s’acquitter de leur responsabilité en remplissant l’attestation mentionnée à la section 6 ci-dessous.
4.2. Sous Leverage Suitability *convenance des stratégies d’endettement+ dans la version proposée du Principe directeur no 2 sur les normes minimales de surveillance des comptes, l’ACFM énumère des critères de base en présence desquels des activités additionnelles d’examen et d’enquête du personnel de surveillance seraient nécessaires. FAIR Canada juge plusieurs de ces critères insuffisants pour protéger adéquatement les investisseurs.
Connaissances en matière de placements
4.3. FAIR Canada recommande que, pour utiliser l’effet de levier afin d’investir, un investisseur de détail doive posséder un niveau minimum de connaissance des marchés financiers et des risques associés à l’effet de levier. Ces connaissances pourraient être attestées indépendamment ou par des courtiers membres de l’ACFM, qui sont soutenus par un fonds d’indemnisation et assujettis à une norme de responsabilité stricte. L’obligation de satisfaire à une norme minimale de connaissance protégera les investisseurs en assurant que ceux qui utilisent l’effet de levier soient conscients des risques que cela comporte.
Tolérance du risque
4.4. FAIR Canada recommande que l’on restreigne encore l’utilisation de l’effet de levier en considérant cette stratégie convenable seulement pour les investisseurs ayant une tolérance élevée du risque. L’utilisation de l’effet de levier amplifie le risque de tout placement. Un investisseur qui recourt à une stratégie d’endettement devra investir dans un produit dont les rendements attendus sont égaux au coût d’emprunt juste pour ne pas perdre d’argent. Le placement devra rapporter un rendement encore plus élevé (ce qui impliquera de prendre un risque encore plus grand) pour que la stratégie soit profitable. Le recours à l’effet de levier amplifie le risque associé au placement et ne devrait être considéré convenable que pour les investisseurs ayant une tolérance élevée du risque.
Valeur nette
4.5. FAIR Canada met en doute la pertinence de se fonder sur la valeur nette pour déterminer la convenance d’une stratégie d’effet de levier, car la valeur nette élevée d’une personne tient très souvent à son élément d’actif principal : sa maison. Nous pensons que la détermination de la convenance de l’effet de levier ne devrait être fondée sur la valeur nette d’un client incluant sa maison que dans les rares cas où un emprunt sur la valeur nette de la maison est approprié. Comme nous l’avons déjà souligné, nous pensons qu’il est approprié dans de rares cas seulement de permettre à un investisseur d’emprunter sur la valeur nette de sa maison pour faire des placements, soit lorsque l’investisseur comprend pleinement tous les risques et a une grande tolérance du risque et lorsque le montant investi ne dépasse pas un seuil établi – par exemple, 5 % de la valeur nette de la propriété (la valeur nette étant la valeur marchande de la propriété, moins l’encours du prêt hypothécaire et tout privilège ou autre grèvement ou charge visant la propriété).
Revenu brut
4.6. FAIR Canada se demande aussi s’il convient d’exiger des examens et des enquêtes additionnelles du personnel de surveillance seulement lorsque les dettes et les paiements de location totaux dépassent 35 % du revenu brut. Nous nous demandons pourquoi ce critère devrait être fondé sur le revenu brut (plutôt que le revenu net) et jugeons ce seuil trop élevé. FAIR Canada recommande que ce critère de base soit remplacé par « des dettes et des paiements de location totaux dépassant 20 % du revenu net du client » [TRADUCTION].
Statut d’emploi
4.7. « Un prêt à effet de levier ne convient probablement pas à (…) un retraité ».6 L’utilisation de l’effet de levier par les personnes retraitées ou approchant de la retraite devrait toujours faire l’objet d’activités additionnelles d’examen et d’enquête du personnel de surveillance. FAIR Canada pense que le recours à l’effet de levier pour de telles personnes n’est approprié que dans des cas exceptionnels. Selon l’Autorité des marchés financiers (AFM), « [l’investissement par emprunt] ne convient pas au client qui est plus âgé ou qui approche de la retraite et dont le portefeuille est davantage positionné pour maximiser la production d’un revenu et la préservation du capital ».7 À la partie sur la convenance des stratégies d’endettement dans le Principe directeur no 2, il faudrait ajouter un critère en présence duquel un examen additionnel du personnel de surveillance serait nécessaire, soit le cas où l’investisseur est retraité ou est à moins de cinq ans de la retraite.
Capacité d’absorber des pertes
4.8. FAIR Canada recommande aussi l’ajout d’un critère de base mesurant la capacité de l’investisseur d’absorber des pertes. Comme le souligne l’AMF dans sa fiche sur l’effet de levier, les investisseurs devraient « [savoir exactement] combien d’argent *ils perdraient] dans la pire des éventualités ».8 Il est important que les investisseurs déterminent s’ils peuvent se permettre de perdre la garantie qu’ils donnent pour le prêt avant de prendre la décision d’emprunter pour investir. Cela va dans le sens de la recommandation de Kenmar Associates d’ajouter la tolérance des pertes dans la Règle.
5. Les organismes canadiens de réglementation des valeurs mobilières doivent adopter un « modèle Le client avant tout »
5.1. FAIR Canada félicite l’ACFM de reconnaître les risques que représente l’effet de levier pour les investisseurs et de prendre des mesures pour s’assurer que ses membres et les personnes autorisées reçoivent des orientations à ce sujet. Nous sommes heureux que les exigences de l’ACFM aillent au-delà de celles des Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) dans la Norme canadienne 31-103. FAIR Canada pense que les ACVM doivent aborder la question de l’investissement par emprunt dans la Norme canadienne 31-103 afin que tous les investisseurs soient protégés, pas seulement les clients des membres de l’ACFM.
5.2. Tout en reconnaissant que les exigences proposées relativement à la convenance de l’effet de levier dépassent celles prescrites dans la Norme canadienne 31-103, nous ne croyons pas que les règles actuelles en matière de convenance et de connaissance du client protègent adéquatement les investisseurs. Nous continuons d’encourager tous les organismes de réglementation canadiens à adopter un modèle Le client avant tout, qui exigerait que toutes les recommandations faites à des clients soient dans leur intérêt véritable, plutôt que d’exiger simplement qu’elles leur conviennent. FAIR Canada croit qu’un tel changement est essentiel pour corriger le déséquilibre et le décalage des intérêts et des attentes dans les relations inscrits-clients actuelles.
5.3. L’adoption d’un modèle Le client avant tout protégerait mieux les investisseurs contre des utilisations inappropriées de l’effet de levier. Un tel modèle pourrait devenir un élément de l’obligation de vérifier la convenance, ce qui pourrait réduire le délai nécessaire à l’adoption d’une telle norme.
5.4. Le principe fondamental du modèle Le client avant tout serait une règle générale stipulant que, dans tous les aspects de leurs relations avec des clients de détail – ce qui comprend les recommandations, les pratiques de rémunération, les informations à fournir, la gestion des conflits d’intérêts et tous les aspects continus de la relation (comme l’information sur le rendement) –, les prestataires de services financiers doivent faire passer les intérêts des clients en premier.
5.5. Des obligations en matière de convenance ne suffisent pas pour assurer un degré acceptable de protection des investisseurs. Tout participant du secteur qui se présente comme un conseiller offrant des conseils financiers ou faisant des recommandations en matière de placement devrait être tenu d’agir au mieux des intérêts de son client – ce qui veut dire faire passer les intérêts du client avant les siens propres et ceux de sa société.
5.6. Les obligations actuelles des prestataires de services financiers ne concordent pas avec les attentes des investisseurs. Dans le cadre existant, les inscrits sont souvent rémunérés et incités à vendre des produits qui peuvent « convenir » au client, mais qui ne servent pas nécessairement au mieux ses intérêts. Cela est particulièrement vrai des produits comportant des commissions et des frais élevés qui ne sont pas clairement divulgués aux investisseurs. Il est important que les conseillers ne trompent pas les investisseurs sur la vraie nature de la relation par le biais de marketing et de publicité (ce qui comprend les titres qu’utilisent les représentants des ventes).
5.7. D’après le rapport commandé par le Groupe consultatif des investisseurs de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO) à la suite de groupes de discussion tenus avec des investisseurs particuliers, « dans une proportion écrasante, les participants [aux groupes de discussion] ont une confiance inconditionnelle en leur conseiller. Les conseillers, comme les désignent les investisseurs, sont la principale source d’informations sur les placements, et une bonne proportion des investisseurs se fient aveuglément aux avis qui leur sont donnés. Les participants croient vraiment que leur conseiller agit toujours au mieux de leurs intérêts ». [TRADUCTION]9 Le rapport conclut aussi que « tous [les participants des groupes de discussion] croient que leur conseiller a un devoir fiduciaire ». [TRADUCTION]10 FAIR Canada pense que cette impression peut être attribuée, du moins en partie, à la publicité et au marketing du
secteur des services financiers, conçus pour gagner la confiance des consommateurs de
produits et services financiers.
5.8. Il est injuste et néfaste pour les investisseurs que les participants du secteur puissent profiter de cette confiance alors que l’obligation des inscrits se limite à l’évaluation de la convenance. Le rapport du Groupe consultatif des investisseurs attire l’attention sur un grave désalignement des obligations et des attentes; si l’on ne corrige pas rapidement ce problème, la seule conclusion qui puisse être tirée est que les prestataires de services financiers et les organismes de réglementation du secteur appuient un système dont on sait qu’il trompe les consommateurs et qu’il les amène à faire confiance à une industrie qui représente faussement ses services. Comme l’a formulé James Angel, professeur à l’Université de Georgetown, en réponse à la demande de commentaires de la Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis sur l’instauration d’un devoir fiduciaire des courtiers et des conseillers en placement :
Si le produit vendu est un conseil, la norme appropriée devrait être celle d’un fiduciaire et le conseil devrait être dans l’intérêt véritable du client. Autrement, c’est de la fraude, puisque le vendeur dispense un service différent de ce que le consommateur pense acheter. Que le prestataire du conseil se présente comme un courtier, un conseiller, un planificateur, un gestionnaire de patrimoine ou un consultant financier ne devrait avoir aucune importance. [TRADUCTION]11
5.9. Les organismes de réglementation et les législateurs de certains marchés développés, nommément les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie, ont adopté ou sont en voie d’élaborer des réformes favorables aux investisseurs qui comprennent de nouvelles mesures conçues pour renforcer les obligations des prestataires de services financiers à l’égard des investisseurs. La réglementation canadienne accuse selon nous un retard dans ce domaine.
5.10. Nous notons que le Groupe consultatif des investisseurs de la CVMO préconise l’imposition d’un plein devoir fiduciaire pour les prestataires de services financiers.
5.11. FAIR Canada pense que, en vertu du modèle Le client avant tout, les conseillers devraient aussi être tenus d’expliquer clairement les coûts des placements recommandés, d’informer les clients de toute solution de rechange moins coûteuse qui s’offre à eux et d’expliquer pourquoi ils ont déterminé que de tels produits moins coûteux ne serviraient pas au mieux leurs intérêts.
5.12. En outre, les commissions et les incitatifs que l’opération rapporte au conseiller devraient toujours être clairement et pleinement divulgués, dans l’intérêt de la transparence et pour répondre aux préoccupations liées aux conflits d’intérêts, mais l’information ne devrait jamais remplacer les obligations du conseiller en vertu du modèle Le client avant tout. La seule communication des informations à fournir ne justifie pas une recommandation mal adaptée.
6. Attestation
6.1. FAIR Canada recommande que l’ACFM oblige les personnes autorisées à expliquer clairement et pleinement aux clients les risques associés à l’effet de levier lorsqu’elles leur recommandent d’emprunter pour acheter des valeurs mobilières. FAIR Canada suggère des ajouts aux informations sur le risque à fournir en vertu de la Règle 2.6 de l’ACFM. À ce sujet, se reporter à l’appendice 1 du présent document intitulé Version modifiée recommandée de l’Annexe B de l’avis RM-0074 (le document d’information détaillé sur les risques).
6.2. FAIR Canada recommande, une fois que toutes les informations sur le risque de l’effet de levier ont été communiquées, que les personnes autorisées soient tenues d’attester (au bas du document d’information sur les risques) qu’elles ont expliqué les risques de l’effet de levier au client et que, d’après leur évaluation, celui-ci comprend les risques inhérents au fait d’emprunter pour investir. FAIR Canada suggère aussi que l’on oblige l’investisseur à confirmer, dans le même document, que les risques d’emprunter pour investir lui ont été expliqués et qu’il a une grande tolérance du risque, avant de lui permettre d’emprunter pour investir. Vous trouverez à la fin du présent mémoire un exemple de formulaire prescrit d’attestation qui pourrait être ajouté au bas du document d’information sur les risques.
6.3. FAIR Canada recommande que la Règle 2.6 de l’ACVM soit modifiée de manière à exiger qu’une telle attestation soit signée au moment de l’emprunt chaque fois qu’une recommandation de placement par emprunt est faite, même si une attestation a déjà été signée dans les six mois précédant une telle recommandation ou la prise de connaissance du fait qu’un client a contracté un emprunt pour faire des placements.
7. Autres préoccupations et recommandations
7.1. FAIR Canada est préoccupée par le fait que l’obligation des succursales et des sièges sociaux d’examiner les opérations et les recommandations faisant intervenir l’effet de levier ne s’applique pas aux régimes enregistrés (REER et REEE). Certains investisseurs empruntent pour cotiser davantage à leur REER et ainsi recevoir un meilleur remboursement d’impôt; cela ne veut pas nécessairement dire que de tels emprunts à des fins de placement leur conviennent. FAIR Canada recommande que les succursales et les sièges sociaux soient tenus d’examiner les opérations et les recommandations faisant intervenir l’effet de levier pour les régimes enregistrés, au-delà d’un seuil déterminé.
Nous vous remercions de nous avoir donné l’occasion de présenter nos commentaires et nos opinions dans ce mémoire. Nous acceptons volontiers sa publication et serions heureux d’en approfondir le contenu avec vous au moment qui vous conviendra. N’hésitez pas à communiquer
avec Ermanno Pascutto (416 572-2282/ermanno.pascutto@faircanada.ca) ou Marian Passmore
(416 572-2728/ marian.passmore@faircanada.ca).z
Sincèrement,
Fondation canadienne pour l’avancement des droits des investisseurs
Appendice 1 – Version modifiée recommandée de l’Annexe B de l’avis RM-0074
RISQUES D’EMPRUNTER POUR INVESTIR – ATTESTATION DE LA PERSONNE AUTORISÉE ET CONFIRMATION DU CLIENT
Certains risques et facteurs dont vous devriez tenir compte avant d’emprunter des fonds pour investir sont décrits ci-dessous :
Cette stratégie vous convient-elle ?
Emprunter des fonds pour investir comporte des risques. Vous ne devriez envisager d’emprunter pour investir que si :
- vous êtes à l’aise de prendre un risque élevé;
- vous n’éprouvez aucune crainte à l’idée de contracter un emprunt pour acheter des
titres dont la valeur peut augmenter ou diminuer; - vous investissez pour le long terme et avez un revenu stable.
Vous ne devriez pas emprunter pour investir si :
- votre tolérance du risque est faible ou modérée;
- vous investissez à court terme;
- vous avez l’intention de vous servir du revenu de vos placements pour couvrir des
dépenses de subsistance ou pour rembourser votre emprunt. Si ce revenu s’arrêtait ou
diminuait, vous pourriez ne pas pouvoir rembourser votre emprunt.
Vous pourriez perdre de l’argent et vous devrez quand même rembourser l’emprunt
Si vous avez emprunté pour investir et que vos placements perdent de la valeur, vos pertes
seront beaucoup plus importantes que si vous aviez investi vos propres fonds. Que vos
placements soient ou non profitables, vous devrez tout de même rembourser votre
emprunt plus les intérêts. Il est possible, pour pouvoir rembourser votre emprunt, que vous
ayez à vendre d’autres actifs ou à utiliser de l’argent que vous aviez réservé à autre chose.
Si vous donnez votre maison en garantie d’un emprunt, vous pourriez la perdre. Vous devez
obtenir un avis juridique indépendant avant de donner votre maison en garantie.
Même si la valeur de vos placements augmente, vous pourriez quand même ne pas réaliser
suffisamment de gains pour pouvoir acquitter le coût de votre emprunt.
Risque de l’appel de marge : Le prêteur pourrait vous forcer à vendre ou pourrait vendre sans
votre permission si vous ne fournissez pas rapidement des fonds additionnels pour couvrir
une chute de la valeur de vos placements.
Autres considérations
Vous ne devriez pas emprunter pour investir dans le seul but de bénéficier d’une déduction
fiscale. Le coût des intérêts n’est pas toujours déductible. Il se pourrait que vous n’ayez pas
droit à une déduction fiscale et que vos déductions passées fassent l’objet d’un redressement.
Avant d’emprunter pour investir, vous seriez bien avisés de consulter un fiscaliste pour savoir
si le coût de vos intérêts sera déductible.
Avantage pour la personne autorisée et la société
La personne autorisée et la société avec lesquelles vous traitez recevront ___________$
de plus en commissions de recommandation et autres pour avoir vendu des placements
achetés avec des fonds empruntés.
Attestation de la personne autorisée
J’atteste par la présente avoir expliqué au client les risques de l’effet de levier. Je suis d’avis que le client comprend les risques inhérents au fait d’emprunter pour investir.
Signature et date
Nom (en caractères d’imprimerie)
Approbation du superviseur
Signature et date
Nom (en caractères d’imprimerie)
Confirmation du client
Je confirme par la présente que les risques d’emprunter des fonds pour investir m’ont été expliqués, notamment le fait que je pourrais perdre mon investissement et devoir néanmoins
rembourser l’emprunt. J’ai une tolérance élevée du risque et je comprends les risques.
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1 Division des affaires réglementaires, Commission des valeurs mobilières du Nouveau-Brunswick, Tournée d’examens sur l’utilisation de l’effet de levier (juin 2010), en ligne : < http://www.nbsc-cvmnb.ca/nbsc/docs/2010-08-03-Sweep-Report-FINALFR-
web.pdf>. À noter que cet examen couvrait des sociétés membres tant de l’ACFM que de l’OCRCVM.
2 Dans le rapport, « dynamique » est employé à l’égard des comptes avec effet de levier dans lesquels les membres du personnel de la CVMNB doutent qu’il est judicieux de permettre au client d’utiliser l’effet de levier dans le cadre de sa stratégie d’investissement.
3 Note 1 ci-dessus, page 12.
4 RBC Planification financière, « Comment maximiser votre temps et votre argent », en ligne :
<http://www.rbcfinancialplanning.com/RBC:uNHu56wWAAsAC3FoMcwAAAA3/francais/IP-leverage-money-investprofitably_f.html>.
5 Association canadienne des courtiers de fonds mutuels, Avis de réglementation aux membres : Communications trompeuses au sujet de l’endettement externe (RM-0070) (12 mai 2008), en ligne : <http://www.mfda.ca/regulation/notices/RM-0070.pdf>.
6 ACFM, Guide de surveillance de l’effet de levier (19 mai 2010), en ligne : <http://www.mfda.ca/regulation/forms/Leverage_Guide_fr.pdf>
7 Autorité des marchés financiers, Emprunter pour investir. Ce n’est pas pour tout le monde, en ligne : <http://www.lautorite.qc.ca/fr/emprunter-pour-investir.html>
8 Note 7 ci-dessus.
9 Rapport de Brondesbury Group pour le compte du Groupe consultatif des investisseurs, Focus Groups with Retail Investors on Investor Rights and Protection (7 avril 2011), point 1 de l’annexe A, en ligne : <http://www.osc.gov.on.ca/documents/en/SecuritiesCategory1-Comments/com_20110427_11-765_ananda.pdf>
10 Note 9 ci-dessus.
11 James J. Angel, dans son mémoire sur l’étude de la SEC intitulée Study Regarding Obligations of Brokers, Dealers, and
Investment Advisers (24 octobre 2010), en ligne : <http://www.sec.gov/comments/4-606/4606-2822.pdf>.