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Le 23 juillet 2009

DESTINATAIRES :

Association canadienne des courtiers de fonds mutuels
121, rue King ouest, bureau 1000
Toronto (Ont.) M5H 3T9
À l’attention du Secrétaire

et

Commission des valeurs mobilières de Colombie-Britannique
701, rue Georgia ouest
Case postale 10142, Centre Pacifique
Vancouver (C.-B.) V7Y 1L2
À l’attention de Madame Sarah Corrigall-Brown, Conseillère juridique principale

Objet : Sollicitation de commentaires relativement aux modifications proposées à la règle 2.2 de l’ACFM (Comptes des clients), au principe directeur n° 2 (Normes minimales de surveillance des comptes), à la règle 2.8 (Relevés remis aux clients) et à la règle 5.3 (Communications avec les clients)

La Fondation canadienne pour l’avancement des droits des investisseurs (« FAIR Canada ») a le  plaisir de vous donner ses commentaires en réponse à la sollicitation faite par le biais du Bulletin n° 0370-P de l’ACFM sur les modifications proposées à la règle 2.2 de l’ACFM (Comptes des clients), au principe directeur n° 2 (Normes minimales de surveillance des comptes), à la règle 2.8 (Relevés remis aux clients) et à la règle 5.3 (Communications avec les clients).

FAIR Canada est un organisme sans but lucratif indépendant qui se propose de représenter les intérêts des actionnaires et investisseurs individuels canadiens, avec pour mission de parler en leur nom sur les questions touchant la réglementation des valeurs mobilières et d’aider à faire progresser leurs droits. Pour de plus amples renseignements, consultez notre site faircanada.ca.

PORTRAIT DE LA SITUATION

Des pays de partout dans le monde industrialisé s’efforçaient de repenser les relations entre
investisseurs et conseillers en placement. La crise financière est venue accélérer cette tendance.

– Comme souvent, c’est l’autorité des marchés financiers du Royaume-Uni, la FSA (Financial Services Authority), qui montre le chemin. Pour éviter les conflits d’intérêts, elle a  recommandé d’interdire les commissions sur ventes pour les conseillers en placement et  d’adopter à la place une rémunération à base d’honoraires.
– Aux États-Unis, l’administration Obama a proposé de créer une agence de protection des consommateurs de services financiers et d’imposer des obligations fiduciaires uniformes à tous les professionnels de la vente du secteur financier, tenus de toujours faire passer les  intérêts de leurs clients en premier. Dans plusieurs de ses discours, la nouvelle présidente de  la SEC, Mary Shapiro, a reconnu que la commission américaine des valeurs mobilières avait  erré et a préconisé un retour à son mandat premier qui est d’être l’« avocate des investisseurs  ».
– L’Union européenne, l’Australie et d’autres pays ont adopté ou sont en train de mettre en  place des mesures de grande importance et de vaste portée axées sur le même objectif.

Le Canada avait fait figure de pionnier dans les efforts de refonte de la relation client-conseiller, avec des discussions sérieuses en ce sens qui avaient débouché en 2004 sur les propositions du modèle de courtage équitable (MCE) de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario. Ce modèle préconisait de revoir en profondeur toute la réglementation des services financiers de détail en misant sur la simplicité et sur une maximisation de l’accessibilité des investisseurs aux moyens de placement quel que soit le circuit de distribution considéré. Et pour plus de transparence, le MCE prônait que soient divulgués – de manière authentique et en temps opportun – les caractéristiques du placement, ses risques, le rendement du compte du client et tous les frais et honoraires touchés par le conseiller. La CVMO avait même envisagé d’interdire aux sociétés de gestion de portefeuille de prélever des commissions de vente destinées aux courtiers à même l’actif des fonds, et d’obliger plutôt les maisons de courtage à facturer directement leurs clients pour les services fournis.

Malheureusement, le modèle de courtage équitable n’a jamais été adopté. Il a depuis été découpé selon les différents domaines de responsabilité. Les organismes d’autoréglementation – l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM) pour les courtiers en valeurs et l’ACFM pour les fonds communs de placement – ont proposé des règles sur l’information à l’égard de la relation client, les conflits d’intérêts, la convenance des placements, les relevés aux clients, les communications avec les investisseurs et la déclaration du rendement. De leur côté, les ACVM (autorités canadiennes en valeurs mobilières) se penchaient sur la réforme des inscriptions et le traitement des plaintes.

Recommandation – FAIR Canada adhère en général aux propositions de l’OCRCVM et de l’ACFM, qui apporteraient effectivement des améliorations au modèle de relation client-conseiller. Mais elles ne vont pas assez loin pour permettre une refonte complète de cette relation. Nous demandons aux ACVM, à l’OCRCVM et à l’ACFM de passer en revue les nombreuses mesures réglementaires qui existent à l’échelle mondiale, afin d’assurer que la protection des investisseurs canadiens soit à la hauteur des meilleures pratiques en vigueur à l’étranger.

A) Règle 2.2 (Comptes des clients) et Principe n° 2 (Normes minimales de surveillance des comptes)

Les investisseurs individuels sont trop souvent submergés par la masse de documents qu’ils reçoivent lorsqu’ils ouvrent un compte auprès d’un fournisseur de services financiers. La plupart n’ont pas la moindre idée de ce qu’ils paient pour les conseils financiers reçus, des services que peut leur offrir leur conseiller ou d’autres éléments importants pour eux.

Les modifications envisagées de la règle 2.2 ont pour but de clarifier le rôle et les responsabilités des membres de l’ACFM à l’égard de leurs clients. Le but de la nouvelle règle est louable : dire explicitement que les courtiers en fonds communs de placement (FCP) ont le devoir d’évaluer si les placements d’un client conviennent toujours quand surviennent certains « événements déclencheurs » (règle 2.2.1) et de fournir à tous les souscripteurs de FCP des renseignements de base sur leurs placements (règle 2.2.5).

En particulier, le document d’information sur la relation avec le client devra donner des renseignements essentiels sur la nature des rapports entre client et conseiller et des détails sur les produits offerts, en plus d’indiquer la périodicité des relevés de compte du client et la rémunération versée au conseiller.

FAIR Canada demande à l’ACFM de mentionner explicitement que tous les renseignements relatifs aux honoraires, frais et autres éléments de rémunération du conseiller devront figurer dans un document unique, rédigé en termes simples et courants. Nous affirmons que l’information sur la relation est moins limpide dès lors qu’il est permis de faire référence à d’autres documents qui ne sont pas sous les yeux du client. Dans un monde où trop peu de gens lisent ou consultent les formulaires d’ouverture de compte en raison de leur volume et de leur complexité, nous devrions tout faire pour rendre cette information directement accessible. À tout le moins, le principal document d’information devrait inclure un bref sommaire – en langage simple – de tous les textes faisant partie de la documentation.

L’ACFM propose le réexamen de la pertinence des ordres de bourse acceptés et des recommandations pour les comptes de détail lorsque surviennent des « événements déclencheurs », l’analyse devant être faite dans un délai raisonnable et avant l’opération suivante. Des virements ou dépôts inhabituels dans le compte, des changements importants dans la vie du client ou un changement de représentant « déclencheront » par exemple un examen complet de la convenance (règle 2.2.1(e)). Les courtiers devraient au moins faire un tel examen une fois par an et après une variation majeure des marchés.

Surtout après les débâcles boursières, les investisseurs se plaignent souvent que la répartition des actifs de leur portefeuille était inappropriée. Il incombe au courtier comme à l’investisseur de suivre de près ces questions et de s’assurer que le portefeuille ne dévie pas de ce que le client avait dit vouloir pour la répartition de ses actifs et ses objectifs de tolérance du risque. FAIR Canada est d’avis que les nouvelles règles seront importantes pour le suivi des comptes des clients.

L’ACFM prévoit d’émettre un avis de réglementation qui donnera le détail de ce que ses membres devraient inclure dans l’information sur la relation avec le client. Ce dernier document devrait être suffisamment détaillé, complet et explicite, tout en demeurant simple et clair. Les modifications proposées par l’ACFM constituent un pas important vers la divulgation de tout ce qu’un  investisseur éclairé devrait apprendre.

Recommandation – FAIR Canada appuie les règles d’information proposées à l’égard des comptes des clients, du rôle des conseillers financiers et de l’obligation pour les courtiers en FCP de réexaminer la convenance des placements. Il faudrait toutefois aller beaucoup plus loin, en particulier pour la responsabilité fiduciaire et pour les conflits d’intérêts dans la relation entre le client, le conseiller et la maison de courtage.

B) Règle 5.3 (Relevés remis aux clients) et règle 2.8 (Communications avec les clients)

Les investisseurs ont un droit fondamental, celui de savoir sans ambiguïté à quel point leurs placements prospèrent ou périclitent. La plupart veulent simplement avoir un seul chiffre – celui du rendement global de leur portefeuille au cours de l’année écoulée – et savoir comment ce rendement se compare avec celui de l’indice de référence le plus approchant.

Les modifications à la règle 5.3 comportent une nouvelle obligation en ce que le relevé devra indiquer le gain ou la perte enregistré par le compte du client à la fin de la période visée. Il s’agira du total des sommes qui doivent déjà être divulguées sur le relevé de compte de l’investisseur. FAIR Canada appuie ce changement et estime que cette nouvelle exigence est une progression logique en direction d’un accès plus facile des investisseurs aux informations cruciales sur leur portefeuille.

La règle 2.8.3 touche les pratiques des membres de l’ACFM en matière de déclaration du rendement dans le cadre de leurs communications aux clients. Actuellement, les maisons de courtage ne sont pas tenues de fournir des taux de rendement personnalisés, mais pour les courtiers qui choisissent de le faire, les règles stipulent que le client doit être avisé de la méthode de calcul du taux. En l’absence de directive sur la normalisation des modes de calcul des rendements, les courtiers sont libres de décider quelles normes ils respecteront. Les investisseurs individuels ont besoin d’une information claire et pratique sur les résultats de leurs placements : dès lors qu’on leur communique cette information, la déclaration des taux de rendement devrait être faite selon des normes uniformes, permanentes, reconnues par le secteur financier et familières aux investisseurs.

L’ACFM a dit vouloir émettre un avis de réglementation aux membres qui les éclairera sur les pratiques normalisées du secteur en matière de calcul des taux de rendement.

FAIR Canada estime que la proposition sur les déclarations de rendements devrait avoir une portée plus grande encore. Le client doit être en mesure de voir sur son relevé quel est le taux de rendement qui est le sien et comment ce rendement personnalisé se compare avec celui des indices de référence appropriés, afin de pouvoir vraiment évaluer ce que donnent ses placements. Il convient de noter que les nouveaux règlements adoptés au Royaume-Uni exigent de préciser le mode de calcul des rendements annuels et d’inclure les rendements des indices de référence.

Plusieurs sociétés de services financiers se sont plaintes de la complexité de ces calculs. Il est vrai qu’il est parfois difficile de donner des renseignements sur les coûts passés et d’attribuer une juste valeur à certains actifs non liquides.

Mais cela n’est pas le cas pour l’immense majorité des comptes de détail. Et dans le monde institutionnel, il y a toute une industrie de la mesure du rendement, avec l’existence de nombreux systèmes qui décortiquent les résultats des placements et les ventilent par catégorie, par style et selon une foule d’autres critères. On peut donc difficilement accepter qu’un tel service constitue un trop gros obstacle pour les membres de l’ACFM.

Nous soupçonnons qu’une certaine fraction du secteur des services financiers ne souhaite pas trop que ses clients disposent d’une information claire et facilement comparable qui les aiderait à bien
comprendre comment leur portefeuille s’est tenu.

Recommandation – FAIR Canada demande à l’ACFM et aux ACVM d’imposer que les rendements des portefeuilles des clients soient calculés et déclarés individuellement au moins une fois par an, si ce n’est plus. Les autorités réglementaires devraient aussi exiger que les rendements des indices de référence soient eux aussi indiqués sur les relevés.

CONCLUSION

Les nouvelles règles des ACVM et les propositions de l’OCRCVM et de l’ACFM sont des pas de plus sur le long chemin menant à la résolution des problèmes liés aux conflits d’intérêts, à une information déficiente et à d’autres aspects de la relation client-conseiller. Mais elles n’ont pas la portée suffisante pour déboucher sur une nécessaire refonte des règles régissant cette relation. Certains sujets – l’inscription et les plaintes de la clientèle – sont effectivement traités, mais d’autres ne sont même pas évoqués. Il n’y a pratiquement pas eu de débat public au Canada sur les mesures prises à l’étranger pour réduire ou éliminer les pierres d’achoppement entre les courtiers et leurs clients.

Les investisseurs canadiens méritent que la manière dont les services financiers sont vendus et dispensés ici soit repensée d’une manière plus approfondie. FAIR Canada demande aux autorités réglementaires d’étudier ce qui se fait de mieux à l’étranger en matière de rémunérations et d’obligations fiduciaires des conseillers en placement, afin d’assurer que les Canadiens bénéficient  de la même protection que celles offertes aux États-Unis, au Royaume-Uni et sur  d’autres places financières de premier plan, et qu’il y ait un meilleur alignement des intérêts des investisseurs, des conseillers et des fournisseurs de services financiers.

Nous nous ferons un plaisir d’approfondir avec vous nos commentaires, au moment qui sera le vôtre.

Soyez assurés de nos meilleurs sentiments.

Fondation pour l’avancement des droits des investisseurs (FAIR Canada)

POUR INFORMATION

Ermanno Pascutto, Directeur général, FAIR Canada| 416-572-2282
ermanno.pascutto@faircanada.ca
Steve Garmaise, Directeur associé, FAIR Canada | 416-572-2743
steve.garmaise@faircanada.ca