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Le 16 mars 2010

Rosemary Chan
Première vice-présidente et avocate générale
Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières
121, rue King Ouest, bureau 1600
Toronto (Ontario) M5H 3T9
Courriel : rchan@iiroc.ca

Objet : Demande de commentaires sur l’Examen du programme d’arbitrage de l’OCRCVM

Nous avons le plaisir de vous soumettre les commentaires de la Fondation canadienne pour l’avancement des droits des investisseurs (FAIR Canada) en réponse à la demande de commentaires de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (l’OCRCVM) sur l’Examen du programme d’arbitrage de l’OCRCVM (le programme d’arbitrage).

FAIR Canada est un organisme sans but lucratif indépendant d’envergure nationale qui a été fondé en juin 2008 pour représenter les intérêts des investisseurs canadiens dans le domaine de la réglementation des valeurs mobilières. Des renseignements additionnels sur FAIR Canada, sa
gouvernance et ses priorités sont disponibles sur notre site Web à l’adresse faircanada.ca.

Contexte

Le rapport final du Groupe d’experts sur la réglementation des valeurs mobilières (le rapport du Groupe d’experts), publié récemment, résume comme suit l’état actuel des mécanismes de recours des investisseurs au Canada :

« Bien que de nombreux mécanismes aient été mis en place afin d’offrir aux investisseurs des solutions de rechange plus simples et plus économiques que le recours aux tribunaux, le nombre élevé d’organismes, les multiples étapes que comportent les procédures et le manque d’uniformité à l’échelle du Canada font en sorte qu’il est difficile pour les investisseurs de bien comprendre l’ensemble des processus et d’en arriver rapidement à un règlement. Selon certains des comptes rendus, il semblerait que, souvent, les investisseurs ne reçoivent pas l’information leur permettant de connaître l’éventail complet des moyens dont ils disposent pour obtenir une réparation ».1

Dans le cadre de l’examen de son programme d’arbitrage, l’OCRCVM devrait viser à répondre à certaines des préoccupations exprimées dans le rapport du Groupe d’experts et, en particulier, à fournir des solutions de rechange plus simples et plus économiques que le recours aux tribunaux.

FAIR Canada ne participe pas au règlement de différends entre des courtiers et des clients et n’a donc pas de connaissance pratique du programme d’arbitrage de l’OCRCVM. Cependant, comme organisme national de défense des droits des investisseurs, nous souhaitons l’amélioration de tous les mécanismes de traitement des plaintes d’investisseurs et de règlement des différends. FAIR Canada est d’avis que l’OCRCVM joue un rôle crucial dans les processus de traitement des plaintes d’investisseurs individuels et de règlement des différends. Nous nous réjouissons de son examen de son programme d’arbitrage.

Au-delà de notre examen minutieux de la demande de commentaires de l’OCRCVM au sein même deFAIR Canada, nous avons demandé l’avis d’un certain nombre de personnes qui s’intéressent de près à l’avancement des intérêts des investisseurs individuels, dont : des avocats, des spécialistes en règlement de différends, des conseillers et des défenseurs des consommateurs. Nous avons aussi pu passer en revue la soumission préparée par la Small Investor Protection Association (la SIPA) avant d’en arriver à nos quatre recommandations spécifiques. Dans le document qui suit, nous nommons les personnes ou les organismes qui nous ont fait part de leurs perspectives.

Résumé des recommandations de FAIR Canada

1. Création d’un service d’aide aux investisseurs gratuit ou à faible coût. Améliorer le règlement des différends et l’accès à l’arbitrage pour les investisseurs en créant un service gratuit ou à faible coût qui aidera les investisseurs à organiser et à préparer les documents pertinents et la documentation se rapportant à leur demande. FAIR Canada suggère : (a) que ce service soit financé par le fonds d’affectation spéciale de l’OCRCVM et (b) que des groupes de défense des droits des investisseurs de partout au Canada se voient donner la possibilité de l’offrir.

2. Les parties devraient assumer chacune leurs coûts et l’adjudication de frais ne devrait pas être laissée à la discrétion des arbitres. FAIR Canada recommande l’adoption d’une règle, en vertu du programme d’arbitrage de l’OCRCVM, (a) obligeant chaque partie à assumer ses propres coûts et (b) retirant aux arbitres leur pouvoir discrétionnaire d’adjuger des frais, sauf lorsqu’un courtier agit d’une manière abusive ou inéquitable.

3. Améliorer la transparence du processus d’arbitrage. L’OCRCVM devrait publier (sans nommer les parties) un résumé de chaque cas d’arbitrage précisant la nature de la décision et le montant de l’indemnisation. Cela améliorerait la visibilité de son programme d’arbitrage, aiderait les investisseurs à mieux évaluer leur demande et les aiderait également à comprendre si l’arbitrage est une voie à privilégier pour leur affaire.

4. Aucune limite d’indemnisation ou limite minimum de un million de dollars. FAIR Canada recommande : (a) qu’il n’y ait aucune limite à l’indemnité qu’un arbitre peut accorder ou, (b) si une limite est jugée nécessaire, qu’elle soit portée à un minimum de un million de dollars.

Réponses aux questions spécifiques de l’OCRCVM

Dans sa demande de commentaires, l’OCRCVM a posé trois questions spécifiques à propos de son programme d’arbitrage. Nous répondons à chacune de ces questions ci-dessous. Dans cette lettre, nous avons cependant réuni nos réponses aux questions 1 et 2 sous une seule rubrique.

1. Avantages de l’arbitrage, viabilité du programme, expérience des parties à des affaires d’arbitrage dans le cadre du programme et suggestions pour améliorer l’efficacité et l’utilisation du programme

L’option de l’arbitrage qui est offerte aux investisseurs individuels a son utilité. La majorité des personnes et des organismes que nous avons consultés ont reconnu les avantages de l’arbitrage. Ils ont noté que, dans l’ensemble, cela sert les investisseurs qu’un programme leur permette d’accéder à un décideur indépendant, en dehors du système judiciaire, pour régler leurs différends en matière de placements.

Tel qu’il est expliqué dans l’avis de l’OCRCVM, le client qui veut régler un différend avec un courtier membre de l’OCRCVM a le choix entre les trois voies suivantes, en dehors de la procédure interne de traitement des plaintes du courtier membre : (i) le programme d’arbitrage de l’OCRCVM, (ii) le règlement non exécutoire des différends par l’intermédiaire de l’Ombudsman des services bancaires et d’investissement (OSBI) et (iii) le procès civil devant les tribunaux.

Comme le reconnaît l’OCRCVM dans son avis, le nombre d’investisseurs qui ont recours à son programme d’arbitrage a fortement baissé au cours des dernières années. Pour que le programme d’arbitrage de l’OCRCVM reste une solution de rechange viable au programme de règlement non exécutoire des différends par l’intermédiaire de l’OSBI et aux procès civils devant les tribunaux, il faudra qu’un certain nombre de problèmes soient résolus :

a. Le manque d’accès au programme d’arbitrage de l’OCRCVM et la méconnaissance du programme

Glorianne Stromberg, auteure bien connue de plusieurs rapports sur le secteur des services financiers et la protection des investisseurs, note que l’accès à un mécanisme de règlement des différends est l’une des principales difficultés pour les investisseurs. De nombreux investisseurs ignorent l’existence du programme d’arbitrage de l’OCRCVM. Et lorsqu’ils en apprennent l’existence, beaucoup s’en sentent intimidés. Ils le trouvent très juridique et, à moins qu’ils ne retiennent les services d’un avocat, ils se trouvent fortement désavantagés dans la présentation de leurs demandes. Les coûts élevés qui peuvent être associés à l’arbitrage (se reporter au point b ci-dessous), sans droit d’appel, sont aussi un facteur dissuasif.

Garth Rustand, directeur général de l’Investors Aid Co-operative (la Coop), a mentionné que les investisseurs étaient souvent réticents à choisir le programme d’arbitrage de l’OCRCVM, pour les raisons suivantes : (a) il leur manque des connaissances sur ce qui a causé la perte ou pour déterminer si la perte est « raisonnable » ou excessive comparativement au rendement d’un placement mieux adapté, (b) ils comprennent mal les relevés et les documents d’ouverture de compte et (c) ils manquent de services pour les aider à interpréter les placements et les documents liés aux demandes.

M. Rustand note que, même lorsque la Coop transmet une affaire à un avocat, l’investisseur a quand même souvent besoin de son personnel pour définir : (a) les répartitions des actifs existantes et appropriées, (b) l’évaluation du risque, (c) les commissions versées, (d) le rendement passé des produits et (e) les attentes en termes de rendement. M. Rustand nous a confié séparément que la Coop avait apporté du soutien dans deux cas récents où des répartitions des actifs trop audacieuses et donc inadaptées aux investisseurs concernés s’étaient traduites par des pertes accrues pendant la crise financière de 2008, de l’ordre de -8 % à -25 %.

Certains commentateurs ont indiqué que, en raison du manque d’accès à l’arbitrage, les investisseurs individuels ont souvent le sentiment que leurs intérêts ne sont pas adéquatement protégés dans le système actuel. Le concept de « convenance » n’est pas bien compris par les investisseurs individuels, et l’OCRCVM leur offre peu d’orientation à cet égard.
FAIR Canada a abordé la question de la complexité du concept de « convenance » pour les investisseurs individuels (et les courtiers membres) dans sa présentation du 1er décembre 2008 à l’OCRCVM au sujet de son projet de Note d’orientation « Lignes directrices sur l’obligation de connaître son client et l’obligation d’évaluer la convenance ». Dans cette présentation, nous faisions les recommandations suivantes :

« FAIR Canada recommande que l’OCRCVM publie des orientations plus étoffées sur les obligations de ses courtiers membres de connaître leurs clients et d’évaluer la convenance des placements, sous deux formes :

1) pour ses courtiers membres : une note d’orientation ou un guide détaillé fournissant des lignes directrices complètes sur l’application, la mise en application et l’administration des règles concernant ces deux obligations;
2) pour les investisseurs individuels : un guide écrit en langage clair expliquant les deux obligations et les droits des investisseurs et donnant des conseils pour les rapports avec les sociétés de placement et les conseillers en placements à cet égard.

FAIR Canada suggère que le guide à l’intention des investisseurs couvre :

1) les droits des investisseurs – expliquer les obligations des courtiers membres de connaître leurs clients et d’évaluer la convenance des placements, ainsi que les avantages de ces exigences pour les clients;
2) les limites des deux obligations – expliquer la différence entre les fonctions de fiduciaire et les exigences relatives à la convenance; et
3) des conseils pour les investisseurs – présenter les mesures que les investisseurs devraient prendre pour s’assurer que ces obligations sont respectées, que les renseignements de leur profil restent à jour et que leurs placements continuent de leur convenir ».

Les investisseurs individuels doivent surmonter de nombreuses difficultés pour comprendre les options qui s’offrent à eux, et en particulier comprendre la nature de leur demande, l’étendue des dommages et tous les documents qui doivent être organisés et préparés. La difficulté de calculer la perte encourue dans un placement inadapté pour l’investisseur (par rapport à un placement qui lui « convient » mieux) a été mise en évidence dans une réunion de consultation récente avec l’OSBI, à laquelle FAIR Canada a assisté avec un certain nombre d’autres personnes qui s’intéressent de près à l’avancement des intérêts des investisseurs. Une partie de la rencontre a porté sur le processus qu’utilise l’OSBI pour évaluer les demandes se rapportant à des questions de convenance. Il est devenu clair pendant la réunion que peu d’investisseurs sauraient comment le concept de convenance s’applique à eux et de quelle manière il se rapporte à l’obligation de connaître son client et à celle concernant les documents d’ouverture de compte. Les investisseurs individuels auraient aussi du mal à comparer la perte subie au cours d’une période donnée avec les rendements d’un portefeuille mieux adapté. Or, cet écart est un aspect clé que l’on devrait considérer avant de soumettre une plainte à l’arbitrage.

FAIR Canada a envisagé un certain nombre d’options avant d’en arriver à ses recommandations finales, dont celle de suggérer que ce soit l’OCRCVM qui remplisse le rôle d’aider les investisseurs à comprendre leur demande et à l’organiser. Cependant, nous reconnaissons que cette option pourrait être impossible à appliquer, puisque les courtiers membres financent l’OCRCVM et ne seraient pas nécessairement enclins à financer un service orienté vers les investisseurs dans le cadre de différends avec des courtiers. Il convient aussi de noter qu’un certain nombre de groupes de défense des droits des investisseurs essaient d’offrir ce type de service, mais qu’ils manquent de financement. D’un autre côté, l’OCRCVM dispose d’un important fonds d’affectation spéciale (plus de 28 millions de dollars au 31 mars 2009) dont une partie pourrait être rendue disponible pour aider les investisseurs individuels dans le règlement de différends.

Recommandation 1 : En fonction des commentaires et des préoccupations présentés cidessus, FAIR Canada recommande la création d’un service gratuit ou à faible coût qui aidera les investisseurs individuels à comprendre leurs demandes dans un différend, y compris à organiser et à préparer les documents pertinents et la documentation se rapportant à leur demande. FAIR Canada suggère : (a) que ce service soit financé par le fonds d’affectation spéciale de l’OCRCVM et (b) que des groupes de défense des droits des investisseurs de partout au Canada se voient donner la possibilité de l’offrir.

b. Coûts

Les coûts sont une autre préoccupation majeure. Dans le cadre du programme d’arbitrage de l’OCRCVM : (a) les arbitres ont le pouvoir d’accorder une indemnité pouvant aller jusqu’à 100 000 $, plus les intérêts et les frais, (b) les frais de l’arbitrage sont habituellement divisés entre les parties à parts égales, et (c) il est fréquent que les deux parties engagent un avocat. En outre, les courtiers retiennent souvent les services de spécialistes, ce qui contraint les investisseurs à faire de même – et ajoute à leurs frais. Comme nous l’expliquons plus loin, puisque l’adjudication des frais est à l’entière discrétion de l’arbitre, il y a eu des cas où des plaignants dans le cadre du programme d’arbitrage de l’OCRCVM se sont vus imposer le paiement de frais importants, y compris de frais juridiques. La crainte de devoir potentiellement payer des frais importants, en plus des coûts assumés à titre personnel et du montant déjà perdu, dissuade fortement les investisseurs de recourir au programme d’arbitrage de l’OCRCVM.

Par contraste, en vertu du processus de règlement non exécutoire des différends de l’OSBI : (a) l’OSBI peut recommander une indemnisation allant jusqu’à 350 000 $, (b) les plaignants n’ont pas de frais à acquitter pour recourir aux services de l’OSBI et (c) les plaignants qui s’adressent à l’OSBI n’engagent généralement pas d’avocat.

Robert Goldin, vérificateur judiciaire et conseiller d’expérience dans le domaine des différends en matière d’investissement, nous a confirmé que beaucoup de clients renoncent à recourir au programme d’arbitrage de l’OCRCVM en raison des frais élevés qu’ils pourraient se voir imposer. M. Goldin nous a expliqué qu’un investisseur, il y a quelques ans, s’était vu ordonner de payer 30 000 $ en frais juridiques. M. Goldin a aussi noté que les frais juridiques peuvent être plus élevés quand les courtiers sont représentés par des grands cabinets d’avocats. En fonction de son expérience, il suggère : (a) que le programme d’arbitrage soit modifié de sorte que chaque partie paie ses propres frais, et (b) que l’arbitre puisse, à sa discrétion, ordonner que la partie qui a gain de cause soit indemnisée de ses débours. Dans sa lettre de commentaires, la SIPA nous a présenté une analyse détaillée des coûts élevés de l’arbitrage et expliqué pourquoi les frais sont un obstacle énorme pour les investisseurs qui envisagent de recourir au programme d’arbitrage de l’OCRCVM.

FAIR Canada convient que les coûts associés au programme d’arbitrage de l’OCRCVM peuvent être prohibitifs et note que la création d’un service d’aide aux investisseurs gratuit ou à faible coût pourrait permettre de réduire radicalement ces coûts. Cependant, pour que son programme d’arbitrage reste une solution de rechange viable au programme de règlement non exécutoire des différends par l’intermédiaire de l’OSBI et aux procès civils devant les tribunaux, et qu’il reste plus abordable que ces derniers, l’OCRCVM devrait envisager d’adopter une règle qui obligerait chaque partie à assumer ses propres frais liés à l’arbitrage et qui retirerait aux arbitres leur pouvoir discrétionnaire d’adjuger des frais, sauf lorsqu’un courtier agit d’une manière abusive ou inéquitable.

Recommandation 2 : Outre la création d’un service d’aide aux investisseurs gratuit ou à faible coût, FAIR Canada recommande l’adoption d’une règle, en vertu du programme d’arbitrage de l’OCRCVM, (a) obligeant chaque partie à assumer ses propres coûts liés à l’arbitrage et (b) retirant aux arbitres leur pouvoir discrétionnaire d’adjuger des frais, sauf lorsqu’un courtier agit d’une manière abusive ou inéquitable.

c. Transparence limitée

La transparence est limitée actuellement pour les investisseurs dans le cadre du programme d’arbitrage de l’OCRCVM. Il n’y a aucune obligation de publication des décisions, pas même de résumés des faits. Compte tenu d’un grand nombre des préoccupations expliquées ci-dessus au sujet du manque d’accès au programme d’arbitrage et de connaissance de ce programme, FAIR Canada pense qu’il serait profitable à toutes les parties que les décisions et les faits se rapportant aux affaires d’arbitrage soient plus transparents. Cela serait particulièrement utile pour connaître les interprétations des arbitres quant au concept de « convenance », ainsi que les méthodes utilisées pour calculer les pertes. Nous recommandons la publication (sans noms) d’un résumé de chaque affaire d’arbitrage précisant la nature de la décision et le montant de l’indemnisation. Nous pensons que cela aiderait grandement les investisseurs à déterminer si l’arbitrage, dans le cadre du programme d’arbitrage de l’OCRCVM, est la voie à suivre pour eux, et que cela les aiderait à préparer leur affaire.

Recommandation 3 : Pour améliorer la visibilité du programme d’arbitrage de l’OCRCVM et aider les investisseurs à mieux évaluer si l’arbitrage est une voie à privilégier pour leur affaire, publier (sans nommer les parties) un résumé de chaque affaire d’arbitrage précisant la nature
de la décision et le montant de l’indemnisation.

2. Proposition de l’OCRCVM de porter la limite d’indemnisation en vertu du programme à 350 000 $ ou à un autre montant

FAIR Canada est d’accord avec la proposition de l’OCRCVM de relever la limite d’indemnisation. La majorité des personnes et des organismes consultés nous ont confirmé que la limite actuelle était trop basse, en particulier compte tenu de celle de 350 000 $ fixée par l’OSBI. La SIPA, comme elle l’a indiqué dans sa présentation, prône le relèvement de la limite d’indemnisation à 500 000 $. Robert Goldin recommande que la limite soit relevée, mais pense qu’elle devrait être plafonnée à 350 000 $. Glorianne Stromberg et Julia Dublin, avocate principale spécialisée en valeurs mobilières du cabinet Aylesworth s.r.l., ont mis en question la pertinence de plafonner la limite d’indemnisation. Mme Dublin a demandé si d’autres considérations ne devraient pas primer, comme la valeur des actifs restants de l’investisseur, et a noté que, à moins que le bien-fondé d’une limite puisse être clairement articulé, il n’est pas possible d’évaluer de manière utile les mérites de différents montants.

Comme l’OCRCVM l’a expliqué dans son avis, la limite d’indemnisation actuelle dans le cadre de son programme d’arbitrage a été établie en 1999. À cette époque, l’OSBI n’avait pas le mandat d’étudier des demandes liées à des placements, et la voie du règlement non exécutoire des différends par l’intermédiaire de l’OSBI (avec sa limite supérieure de 350 000 $) ne faisait pas partie des options qui s’offraient aux investisseurs. En décembre 2003 (il y a plus de six ans), le groupe de travail sur le fardeau de la réglementation de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario a recommandé que la limite d’indemnisation du programme d’arbitrage de l’OCRCVM soit portée au moins à 350 000 $. Il convient de noter que, dans son avis, l’OCRCVM décrit aussi le programme d’arbitrage de la FINRA, qui, bien qu’il soit très différent du sien, ne comporte pas de limite d’indemnisation.

Tel qu’expliqué précédemment, le client qui veut régler un différend avec un courtier membre de l’OCRCVM a le choix entre les trois voies suivantes, en dehors de la procédure interne de traitement des plaintes du courtier membre : (i) le programme d’arbitrage de l’OCRCVM, (ii) le règlement non exécutoire des différends par l’intermédiaire de l’OSBI et (iii) le procès civil devant les tribunaux.

OSBI : Programme de règlement non exécutoire des différends

Tel que décrit dans l’avis de l’OCRCVM, l’OSBI est un service d’ombudsman fournissant un
programme de règlement des différends non obligatoire pour les fournisseurs de services financiers participants et leurs clients. Les plaignants n’ont pas de frais à acquitter pour recourir aux services de l’OSBI et celui-ci peut recommander une indemnisation allant jusqu’à 350 000 $. Les plaignants qui s’adressent à l’OSBI n’engagent généralement pas d’avocat. Les parties ne comparaissent pas devant un tiers pour présenter leur cause. Lorsque l’investisseur fait une plainte à l’OSBI, les membres du personnel de l’OSBI s’informent des faits par l’examen des documents fournis par les parties, par des entrevues avec le plaignant et les représentants du courtier membre et par des entretiens avec les tiers intéressés. Ils prennent également en compte les pratiques de la profession, le droit applicable et effectuent les recherches et les calculs de pertes. L’OSBI en arrive ensuite à une conclusion au sujet de l’indemnisation, en fonction de ce qui est considéré « juste » dans les circonstances (un concept souvent difficile à définir avec précision). La recommandation de l’OSBI n’est pas exécutoire, mais les noms des sociétés membres qui refusent de mettre en oeuvre ses recommandations sont rendus publics, avec les faits de l’affaire.

Arbitrage et procès

L’arbitrage a de nombreux points en commun avec le procès civil. Dans les deux cas, les parties
engagent souvent un avocat, elles présentent leur cause respective à un tiers impartial, et les arbitres comme les juges prononcent des décisions exécutoires en fonction des faits et des arguments présentés. Cependant, l’arbitrage est censé être plus souple, plus expéditif et plus économique que le procès. Les parties peuvent s’entendre sur le déroulement de la procédure d’arbitrage. En arbitrage, il y a moins de possibilités de retards de la procédure, du fait que la communication de la preuve, les requêtes et les appels sont généralement plus restreints. Autre différence importante : en arbitrage, la procédure et les décisions sont confidentielles, tandis qu’en règle générale, devant les tribunaux, les documents produits et les audiences sont accessibles au public.

Porter une demande devant les tribunaux est souvent coûteux, long et extrêmement frustrant pour les investisseurs. Le règlement d’une cause dans le système judiciaire peut s’étaler sur plus de dix ans et le processus engendre invariablement des frais juridiques exorbitants et inutilement élevés.

FAIR Canada pense que, pour être viable, le programme d’arbitrage de l’OCRCVM doit devenir pour les investisseurs une solution de rechange plus attrayante que le procès civil, particulièrement pour les demandes élevées. À notre avis, il ne devrait y avoir aucune limite d’indemnisation, ou bien la limite actuelle devrait être portée à un minimum de un million de dollars. En vertu du régime actuel : (1) les investisseurs qui présentent des demandes de 350 000 $ ou moins choisissent généralement l’option de l’OSBI, tandis que (2) ceux qui souhaitent réclamer plus de 350 000 $ en pertes sont forcés de recourir au procès civil devant les tribunaux, du fait du montant limité des indemnités pouvant être accordées en arbitrage. Compte tenu de l’option de l’OSBI, porter la limite à 350 000 $ ne ferait pas nécessairement du programme d’arbitrage de l’OCRCVM une solution de rechange sérieuse au procès. La limite doit être relevée à beaucoup plus que 350 000 $. L’élimination pure et simple de la limite ou son relèvement à un montant nettement plus élevé, comme un million de dollars, offrirait aux investisseurs une solution de rechange viable et attrayante à la voie couteuse en argent et en temps du procès civil.

Recommandation 4 : FAIR Canada recommande : (a) qu’il n’y ait aucune limite à l’indemnité qu’un arbitre peut accorder ou, (b) si une limite est jugée nécessaire, qu’elle soit portée à un
minimum de un million de dollars.

Nous serions heureux d’approfondir avec vous nos commentaires. N’hésitez pas à communiquer avec Ermanno Pascutto (416 572-2282/ermanno.pascutto@faircanada.ca) ou Ilana Singer (416 572-2215/ilana.singer@faircanada.ca).

Sincèrement,

Fondation pour l’avancement des droits des investisseurs

1 Rapport final et recommandations du Groupe d’experts sur la réglementation des valeurs mobilières, page 39.